terça-feira, 12 de outubro de 2010

Sobre eles, dentre eles, como se não houvesse ninguém

[s/i/c]




'Eles surgiram como se de um sonho'
-extrato do romance Désert [Deserto], de J.M.G. Le Clézio


Saguiet el Hamra, hiver 1909 – 1910

Ils sont apparus, comme dans un rêve, au sommet de la dune, à demi cachés par la brume de sable que leurs pieds soulevaient. Lentement ils sont descendus dans la vallée, en suivant la piste presque invisible. En tête de la caravane, il y avait les hommes, enveloppés dans leurs manteaux de laine, leurs visages masqués par le voile bleu. Avec eux marchaient deux ou trois dromadaires, puis les chèvres et les moutons harcelés par les jeunes garçons. Les femmes fermaient la marche. C’étaient des silhouettes alourdies, encombrées par les lourds manteaux, et la peau de leurs bras et de leurs fronts semblait encore plus sombre dans les voiles d’indigo.

Ils marchaient sans bruit dans le sable, lentement, sans regarder où ils allaient. Le vent soufflait continûment, le vent du désert, chaud le jour, froid la nuit. Le sable fuyait autour d’eux, entre les pattes des chameaux, fouettait le visage des femmes qui rabattaient la toile bleue sur leurs yeux. Les jeunes enfants couraient, les bébés pleuraient, enroulés dans la toile bleue sur le dos de leur mère. Les chameaux grommelaient, éternuaient. Personne ne savait où on allait.

Le soleil était encore haut dans le ciel nu, le vent emportait les bruits et les odeurs. La sueur coulait lentement sur le visage des voyageurs, et leur peau sombre avait pris le reflet de l’indigo, sur leurs joues, sur leurs bras, le long de leurs jambes. Les tatouages bleus sur le front des femmes brillaient comme des scarabées. Les yeux noirs, pareils à des gouttes de métal, regardaient à peine l’étendue de sable, cherchaient la trace de la piste entre les vagues des dunes.

Il n’y avait rien d’autre sur la terre, rien, ni personne. Ils étaient nés du désert, aucun autre chemin ne pouvait les conduire. Ils ne disaient rien. Ils ne voulaient rien. Le vent passait sur eux, à travers eux, comme s’il n’y avait personne sur les dunes. Ils marchaient depuis la première aube, sans s’arrêter, la fatigue et la soif les enveloppaient comme une gangue. La sécheresse avait durci leurs lèvres et leur langue. La faim les rongeait. Ils n’auraient pas pu parler. Ils étaient devenus, depuis si longtemps, muets comme le désert, pleins de lumière quand le soleil brûle au centre du ciel vide, et glacés de la nuit aux étoiles figées.

Ils continuaient à descendre lentement la pente vers le fond de la vallée, en zigzaguant quand le sable s’éboulait sous leurs pieds. Les hommes choisissaient sans regarder l’endroit où leurs pieds allaient se poser. C’était comme s’ils cheminaient sur des traces invisibles qui les conduisaient vers l’autre bout de la solitude, vers la nuit. Un seul d’entre eux portait un fusil, une carabine à pierre au long canon de bronze noirci. Il la portait sur sa poitrine, serrée entre ses deux bras, le canon dirigé vers le haut comme la hampe d’un drapeau. Ses frères marchaient à côté de lui, enveloppés dans leurs manteaux, un peu courbés en avant sous le poids de leurs fardeaux. Sous leurs manteaux, leurs habits bleus étaient en lambeaux, déchirés par les épines, usés par le sable. Derrière le troupeau exténué, Nour, le fils de l’homme au fusil, marchait devant sa mère et ses sœurs. Son visage était sombre, noirci par le soleil, mais ses yeux brillaient, et la lumière de son regard était presque surnaturelle.

Ils étaient les hommes et les femmes du sable, du vent, de la lumière, de la nuit. Ils étaient apparus, comme dans un rêve, en haut d’une dune, comme s’ils étaient nés du ciel sans nuages, et qu’ils avaient dans leurs membres la dureté de l’espace. Ils portaient avec eux la faim, la soif qui fait saigner les lèvres, le silence dur où luit le soleil, les nuits froides, les lueurs de la Voie lactée, la lune ; ils avaient avec eux leur ombre géante au coucher du soleil, les vagues de sable vierge que leurs orteils écartés touchaient, l’horizon inaccessible. Ils avaient surtout la lumière de leur regard, qui brillait si clairement dans la sclérotique de leurs yeux.

Jean-Marie Gustave Le Clézio




Saguiet al-Hamra, inverno 1909-1910

Eles surgiram como se de um sonho, no cimo da duna, meio envoltos pela bruma de areia que seus pés soerguiam. Lentamente seguiam descendo para o vale, no rastro da trilha quase invisível. Adiante da caravana havia os homens, envoltos em suas túnicas de lã, os semblantes mascarados pelo véu azul. Junto a si trotavam dois ou três dromedários, depois as cabras e as ovelhas tangidas pelos meninos. As mulheres sobrevinham na retaguarda. Eram silhuetas avultadas, encobertas pelos pesados mantos, e a pele de seus braços e testas assomava ainda mais sombria sob o índigo dos véus.

Caminhavam sem ruído sobre a areia, sem perscrutar para onde seguiam. O vento soprava continuamente, o vento do deserto, quente durante o dia; frio, à noite. A areia redemunhava em torno deles, entre as patas dos camelos, açoitando o rosto das mulheres que aprumavam os véus azuis sobre os olhos. Os garotinhos corriam, os bebês choravam, envoltos em trapos azuis no dorso de suas mães. Os camelos triniam, nitriam. Ninguém sabia para onde eles seguiam.

O sol já ia alto no céu nu, o vento arrastava os ruídos e os odores. O suor grudava-se lentamente sobre o rosto dos viajantes. E suas peles escuras haviam captado o reflexo do índigo, sobre as bochechas, sobre os braços, ao longo das pernas. As tatuagens azuis na testa das mulheres rebrilhavam como escaravelhos. Os olhos negros como fossem gotas de cobre, mal apercebendo a imensidão da areia, buscando o traço da trilha entre as vagas das dunas.

Não havia mais ninguém sobre a terra, ninguém, avulso que fosse. Eles nasceram do deserto, nenhum outro caminho lhes poderia conduzir. Eles nada proferiam. Nada queriam. O vento passava sobre eles, dentre eles, como se não houvesse ninguém sobre as dunas. Eles caminhavam após o romper da aurora, sem se deter, a fadiga e a sede os envolvia como uma redoma. A secura havia enrijecido seus lábios e suas línguas. A fome os roía. Eles não iriam mais falar. Tinham se tornado, depois de tão longo tempo, mudos como o deserto, plenos de luz como quando o sol brilha no centro do céu ermo, enregelados pela noite de estrelas em coágulo.

Eles continuavam a descer lentamente a encosta até a cava do vale, ziguezagueando quando a areia afrouxava-se sob seus pés. Os homens escolhendo sem olhar o solo em que os pés iriam pousar. Era como se caminhassem sobre o traço invisível que os conduziam à outra extremidade da solidão, à noite. Um só dentre eles portava um fuzil, uma carabina de gatilho com um longo barril de cobre enegrecido. Ele a trazia sobre o peito, encerrada entre seus braços, o cano apontado para o alto como o mastro de uma bandeira. Seus irmãos caminhavam a seu lado, envoltos em suas túnicas, um pouco vergados para frente sob o peso dos fardos. Sobre as túnicas o traje azul aos trapos, esfarrapado pelos espinhos, gasto pela areia. Atrás da tropa extenuada, Nour, o filho do homem do fuzil, caminhava à frente de sua mãe e de suas irmãs. Seu rosto estava fosco, enegrecido pelo sol, mas seus olhos brilhavam, e a luz de seu olhar era como que sobrenatural.

Eram homens e mulheres da areia, do vento, da luz, da noite. Eles tinham aparecido como se de um sonho, no cimo de uma duna, como se tivessem nascido de um céu sem nuvens, e carregassem em seus membros a aspereza do espaço. Eles levavam consigo a fome, a sede que faz sangrar os lábios, o silêncio silexeado de sol, as noites frias, o resplendor da Via Láctea, a lua; traziam consigo a enorme sombra após o sol se pôr, as ondas de areias virgens, que seus artelhos extenuados tocavam, o horizonte inacessível. Eles tinham sobretudo a luz de suas visões que brilhavam tão claramente na esclerótica dos olhos.


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